La pluie lui a donné de l' eau elle en a fait des diamants l'alchémille écrin de lumières
L’alchémille doit son nom aux alchimistes qui y récoltaient l’eau céleste. Les gouttes de rosée, condensé de vapeurs terrestre et céleste, célèbrent le mariage alchimique au creux de ses feuilles. C’est cette eau d’une parfaite pureté qui entraient dans la préparation de la pierre philosophale.
Le petit peuple préfère l’appeler « Manteau de Notre Dame », « Frauenmantel », « Lady’s Mantle » et la pare de toutes les vertus médicinales.
La pluie n’en finit pas de nous faire des cadeaux…
Enfin un printemps anglais ! Un printemps en vert et bleu. Elles manquaient tant à John ces nappes de brume bleue flottant dans les sous-bois. Where are the bluebells ? La question revenait à chaque printemps mais elles étaient là, dans le talus, à attendre des jours meilleurs.
Des jours meilleurs et de l’eau. Les jacinthes des bois sont revenues à la vie à la mort de nos épicéas victimes du scolyte. Du haut de leur 30 mètres, ils aspiraient chaque jour des milliers de litres d’eau dans le talus. Depuis leur disparition, la vie s’y déchaîne. Aujourd’hui, les bluebells doivent se battre pour exister au milieu des silènes blanches, des pervenches, du millepertuis, des mahonias et autres invasives.
Alignement idéal des planètes? Miraculeuse alternance de douceur, de pluies, de chaleur ? Le magnolia ‘Fairy White’ ou magnolia Michelia s’est décidé à ouvrir ses gros bourgeons de velours fauve. En une semaine, ses fleurs d’un blanc éclatant s’ouvrent une à une. Féérique.
Planté en automne 2017, il aura fallu attendre sept ans pour découvrir que le pépiniériste ne nous avait pas menti : de sublimes fleurs aux pétales étroits, un cœur en bouquet d’étamines saillantes autour d’un pistil jaune pâle, un parfum subtil, « typé, fruité, légèrement citronné »… divin.
Les uns sont déjà en train de préparer la « fête de la grenouille ». Au menu : « cuisses de grenouilles à volonté ». Un festin alimenté par les cuisses congelées en provenance d’eaux saumâtres d’Indonésie pour la plupart, puisque l’espèce est protégée dans l’Union européenne.
Les autres se lèvent tôt pour édifier des crapaudromes, des voies de circulation protégées, car combien d’automobilistes ralentissent-ils en voyant des panneaux d’alerte de traversées de batraciens ?
Les uns se gavent, les autres jouent les colibris.
Chez nous, crapauds et grenouilles migrent tranquillement de la mare à l’étang, du bassin au ruisseau sans autre risque que de rencontrer le héron ou le chat. Le héron arrive peut-être à en picorer dans l’étang. Le chat rentre toujours bredouille.
Et bientôt, ce sera le beau spectacle des grenouilles prenant le soleil sur leur feuille de nénuphar, happant moustiques et moucherons.
Près de 3000 tonnes de cuisses de grenouilles vont encore débarquer en France cette année, selon la Direction générale de l’alimentation. La plupart d’Indonésie alors que « l’Inde et le Bangladesh étaient les principaux fournisseurs de la France dans les années 1980-1990, jusqu’à ce qu’ils décident d’arrêter l’exportation à cause de l’effondrement des populations et des effets dominos des captures de masse, comme la prolifération des moustiques et des ravageurs de cultures et, en conséquence, une augmentation de l’utilisation des pesticides ».
Depuis notre arrivée dans les Vosges, les bergeronnettes font notre printemps. Miracle du 10 mars, elles reviennent du Midi, ou de plus loin, pour faire le spectacle : loopings, vols stationnaires, vols ascensionnels, arpentage du jardin au rythme des hochements de queue.
Comment ces petits oiseaux si frêles, si légers traversent-ils vents et tempêtes pour revenir à nous ? En remontant le cours de la Saône (et évitant les éoliennes) pour retrouver notre petit ruisseau ?
Ce 10 mars, ce sont deux couples qui sont arrivés. Après des années à observer le déclin de ces hôtes si joyeux, on va dire que nous sommes rassurés.
Ce n’est pas le printemps pour tout le monde. La salamandre, installée au fond du regard de l’arrivée d’eau d’arrosage, n’a aucune envie de se réveiller.
A visiter : la nature vosgienne et le magnifique site d’Hervé Parmentelat :
Quelques jours de soleil sur un sol gorgé d’eau et c’est la jungle. Si le Roundup ne contient plus que de l’acide acétique (du vinaigre vendu à prix d’or), il n’est toujours pas question d’incommoder les lombrics.
On a sorti sécateurs et cisailles, binettes et serfouettes, fourches, râteaux et grelinettes. Une hyperactivité qui fait le bonheur des chats et qui a éloigné l’intrus.
Dommage qu’on ne puisse compter sur l’aide des voisins…
Depuis un mois, à la faveur de la pluie, un visiteur a pris ses aises dans le jardin. Un visiteur tout rond, de la taille d’un chat, au pelage fauve. Serait-ce possible qu’un castor soit venu de la forêt ?
En dépit des apparences, l’animal est vif et détecte les mouvements à grande distance. J’ai tout de même réussi à l’approcher avant qu’il ne plonge et ne reste en apnée dans le bassin d’eau glacée. Entre la pluie battante et l’inquiétude de retrouver le visiteur noyé, j’ai abandonné la partie.
Il n’a pas la queue plate du castor et il a de magnifiques moustaches blanches. Il s’agirait donc d’un ragondin. Mais alors, pourquoi préfère-t-il le talus et ignore-t-il le ruisseau ? Mystère. Mystère et inquiétude : le ragondin est un nuisible particulièrement envahissant. Heureusement, il préfère l’herbe aux hellébores. Reste à espérer que la reprise des travaux le convaincra de retourner d’où il vient…