Stupéfaction

Jeudi, jour dont nous n’imaginions pas encore la gravité, Marie-Anne et moi parlions lichens, couleurs et poésie. J’avais recherché un poème de Francis Ponge mais sans succès. Toujours prête à relever les défis poétiques, La Bouche à Oreilles a retrouvé un vers aux résonances troublantes :

« Les patrouilles du lichen colonisant le roc stupéfait »

Elle n’a pas trouvé la suite mais le haïku qu’elle a fait de cette bribe de poème est lourd de sens :

les patrouilles bleues

des lichens colonisent

le roc stupéfait

Je vais me mettre en quête des recueils de Francis de Ponge.

Merci Marie-Anne !

Souvenirs marins ?

Dans le Grand Nord, on les appelle « lichens des rennes » ou « mousse de caribous ». Pour moi, ils évoquent plutôt un lointain passé marin, entre algues et coraux, bleu gris comme la mer du Nord par gros temps.

Nourriture des rennes, les lichens inspirent aux scientifiques nordiques aussi des images poétiques : ils y voient des « micro-paysages » comme des « forêts de baobabs »…

Moi j’y vois des algues, des coraux, des éponges… Chaque matin, j’en ramasse comme je ramasserais des coquillages échoués sur le sable…

Au jardin nu

les jeunes herbes
entre chaque brin
miroite l’eau

Un « profond sentiment solitaire d’impermanence »… éveillé ou réveillé par le billet de Marie-Anne dédié à « Chiyo-Ni, bonzesse au jardin nu » ? Il m’a laissée en arrêt devant les jeunes pousses d’après la pluie à l’orée de la forêt…

J’ai cherché

sous les nuages de pluie
ventre gonflé
la grenouille

mais c’étaient encore des nuages d’hiver…

Merci Marie-Anne

Rouge brasier

La forêt vosgienne flambera-t-elle comme une torche australienne ? Il aura suffi d’un hiver pluvieux pour oublier le dépérissement des sapins, des hêtres ou des frênes, les scolytes, les chenilles processionnaires et autres parasites. C’est sûr qu’il y a plus urgent que la crise sanitaire qui décime la forêt…

Liquidambar ou copalme d’Amérique

La forêt flambera-t-elle ou prendra-t-elle les belles couleurs du liquidambar ? En automne 2020, l’ONF a créé un « sylvatum » à Monthureux-sur Saône, au coeur de la forêt de Darney. Une parcelle conçue comme une mosaïque d’une quarantaine d’essences variées qui se protègent les unes les autres. Parmi ces essences plus résistantes à la sécheresse : le pin maritime, le pin d’Alep, le chêne sessile, le chêne méditerranéen ou chêne vert, le cèdre de l’Atlas, le robinier faux acacia… et le liquidambar flamboyant en automne.